Un tour d'horizon de mes lectures, contemporaines ou classiques. De la poésie, juste pour le plaisir des mots ... De la littérature de jeunesse, au fur et à mesure de mes découvertes. Un peu de cinéma et de la BD de temps à autre ... Bienvenue ... à fleur de mots!
Roman traduit du japonais par Sophie Refle
Editions Actes sud, 2011 (pour la traduction française)
Collection : Babel noir
314 pages
Pour commencer, un grand merci à Adalana car je n’aurais sans doute pas découvert Higahino Keigo, l’un des auteurs majeurs du polar japonais sans le challenge "Ecrivains japonais 2013" qu’elle a organisé.
Le Dévouement du suspect X a reçu le prix Naoki, en 2005. C’est une récompense importante au Japon, amplement méritée à mon avis tant l’intrigue est passionnante et habilement construite. C’est un énorme coup de cœur, que je vous présente aujourd’hui et je ne tarderai pas à me plonger dans La Maison où je suis mort autrefois (2010, Prix polar international de Cognac) et Un café maison (2012), publiés dans la collection « Actes noirs ».
Difficile de résumer un tel polar ! Un meurtre est commis dés les premières pages. Le lecteur, qui connaît donc le coupable, se trouve happé par l’enquête de police, impatient de savoir comment tout cela va finir. Ce que nous livre la quatrième de couverture et que je vais résumer selon mon propre ressenti, ne dévoile en rien le cœur de l’intrigue. En fait, tout au long du roman, le lecteur ne se pose pas les mêmes questions que les enquêteurs car nous avons des données qu’ils n’ont pas : que s’est-il passé après le meurtre ? Quelles instructions précises Igashimi va-t-il donner à Yasuko ? En faveur de quel scénario ?
C’est un peu comme si deux enquêtes étaient menées en parallèle et que les deux se rejoignaient à la fin. L’art de Higashino Keigo est de nous conduire tous, progressivement, vers un dénouement pour le moins inattendu…
L’histoire
Yasuko élève seule sa fille Misato. Ancienne entraîneuse dans un bar de nuit, elle a suivi Sayoko et son mari, qui ont monté un commerce de restauration, appelé « Bententei ». Igashimi, professeur de mathématiques achète ses boîtes repas chez ce traiteur, ce qui lui donne un prétexte pour voir Yasuko, sa voisine, dont il est amoureux. Yasuko n’est pas attirée par cet homme à la personnalité énigmatique : « elle avait conscience de son existence de la même manière qu’elle savait qu’il y avait des fissures sur les murs de son appartement. Elle n’y attachait aucune importance et ne voyait pas la nécessité de le faire. » (14) Mais un soir, à son domicile, Yasuko étrangle son ex-mari, qui ne cesse de la harceler et qui vient de s’en prendre à Misato. Igashimi, qui a tout entendu, prend les choses en mains et propose à Yasuko de faire disparaître le corps. Il lui indique très précisément la conduite à tenir face à la police, lui fabrique un alibi et la jeune femme, dont la seule volonté est de protéger sa fille Misato, se conforme à ses instructions.
Un cadavre horriblement mutilé est retrouvé et identifié : la police établit qu’il s’agit de Togashi , l’ex-mari de Yasuko et celle-ci ne tarde pas à être questionnée voire soupçonnée du crime. Mais l’enquête piétine. L’inspecteur Kusanagi, chargé de l’affaire, consulte souvent son ami Yukawa, « un brillant physicien aux impressionnantes facultés de déduction logique » (4e de couverture). Yukawa a connu Igashimi à l’université. A l’époque, ils étaient tous deux fascinés par le problème P ≠ NP :
« Est-il plus difficile de chercher la solution d’un problème que de vérifier sa solution ? »
Tout est dans cet aphorisme scientifique auquel s’ajoute ce que Yasuka se rappelle avoir dit à Ishigami :
« Dans notre monde, aucun engrenage n’est inutile, et c’est l’engrenage lui-même qui décide à quoi il servira. » (p. 275)
Un coup de coeur !
J’ai adoré ce polar, que j’ai lu en 24 heures, sans presque pouvoir m’interrompre tant j’avais hâte de connaître l’issue de toute cette sombre affaire. On se fait très vite aux noms de lieux et de personnages japonais, des sonorités dont on a peu l’habitude : je craignais d’être perdue, ce ne fut pas du tout le cas.
Higashino Keigo a beaucoup travaillé sur la psychologie de ses personnages pour les rendre attachants ou surprenants : à côté de Yasuko et de sa fille, criminelles malgré elles et pour lesquelles on ressent une vive empathie, la froideur calculatrice et les motivations d’Igashimi m’ont paru effrayantes. Je n’en dirai pas plus, mais je vous conseille de vous précipiter chez votre libraire si vous êtes amateurs(trices) de polar noir : Le Dénouement du suspect X est magistral !
Cette chronique est donc ma première contribution au challenge « Ecrivains japonais 2013 » chez Adalana et au challenge « A tous prix » chez Laure.
Belle lecture !
Heide