Un tour d'horizon de mes lectures, contemporaines ou classiques. De la poésie, juste pour le plaisir des mots ... De la littérature de jeunesse, au fur et à mesure de mes découvertes. Un peu de cinéma et de la BD de temps à autre ... Bienvenue ... à fleur de mots!
John Irving, Liberté pour les ours !
Roman traduit de l'américain par Josée Kamoun
Editions du Seuil, mai 1991 pour la traduction française (Points, 434 pages)
Titre original : Setting Free the Bears, 1968
Rares sont les livres qui me laissent une impression aussi mitigée que ce premier roman de John Irving, paru en France en 1991, vingt-trois ans après sa première publication aux Etats-Unis, sous le titre Setting Free the Bears. J’adore John Irving, son inventivité, sa façon de mêler comique et tragique dans des histoires rocambolesques dont les personnages ont une telle épaisseur qu’ils nous accompagnent ensuite longtemps.
Et c’était le cas au début de ce roman, brillamment construit en trois parties - « Siggy », « les carnets » et « Liberté ! » : on est embarqué au rythme de « la bête », une vieille moto anglaise, rutilante, sur laquelle deux jeunes hommes, Graff et Siggy, amis de fraîche date, vont quitter leur ville, la Vienne des années 60, destination l’Italie. Pour ce grand « voyage du tonnerre » dont Siggy rêve depuis longtemps, « pas de projets précis, pas d’itinéraire établi à l’avance, pas de délais. » (20) Mais une philosophie bien à eux : « Il suffit de penser aux choses très fort. Tu penses à des montagnes, mettons, ou à des plages. Tu penses à des veuves riches et des petites paysannes et puis tu tends le doigt dans la direction où tu penses les trouver et tu choisis les routes de la même manière, tu les choisis pour les côtes ou les virages ; c’est le deuxième point, ça, choisir les routes qui vont plaire à la bête. » (20) Et l’on rit des situations burlesques dans lesquelles les deux comparses se retrouvent, on s’amuse de leurs facéties et l’on se demande ce que l’auteur, qui semble s’être amusé aussi, aura bien réussi à inventer, à la page suivante, entre deux parties de pêche…
En visitant le zoo de Hietzing, Graff et Siggy découvrent pourtant les conditions de vie déplorables des animaux et dès lors, Siggy n’a plus qu’une idée en tête : libérer ours, oryx, girafes et tous leurs compagnons d'infortune, faire le casse du zoo en somme ! Entre temps, sur la route, Graff tombe sous le charme de la douce Gallen, ce que lui reproche vigoureusement son ami puisque cela met un terme à leur périple...
Grâce aux carnets de Siggy, dont nous prenons connaissance après le terrible accident, on lit le journal que Siggy a tenu pour Graff, dans la nuit du 5 au 6 juin 1967, lorsqu’il s’est laissé volontairement enfermer dans le zoo. Parallèlement, on prend connaissance de l’histoire de sa mère, de sa rencontre avec son premier prétendant, Zahn Glanz, qui n’est pas le père biologique de Siggy, mais qui fut tout de même l’instillateur de ce que serait cet enfant dans l’esprit de sa mère. Puis sa rencontre avec le yougoslave Vratno Javotnik, le géniteur. Ces carnets, expurgés des poèmes, ont été réorganisés par Graff selon l’alternance un quart de surveillance au zoo (journal de la nuit clandestine de Siggy, du premier au vingt-deuxième quart) et ses « Préhistoire » I puis II, « autobiographie hautement sélective de Siegfried Javotnik », lesquelles contiennent des données historiques très complexes sur la période de la montée du nazisme et de l’Anschluss : l’annexion de l’Autriche par l'Allemagne nazie, le 12 mars 1938, nous est racontée par Siggy dans Préhistoire I. C’est dans cette partie des carnets que j’ai perdu le fil et que mon intérêt s’est émoussé car j'avais trop peu de connaissances sur la période, je pense. Il faut avoir une idée des personnalités historiques autrichiennes, connaître les événements survenus dans les Balkans pour profiter pleinement de la lecture. Ce matin, j'ai lu la page sur l'Anschluss de Wikipédia, ce que j'aurais dû faire en préambule.
D’où mon avis mitigé car si indéniablement, Liberté pour les ours ! est un bon premier roman, surprenant, original et d’une très grande qualité littéraire, je n’ai pourtant pas été captivée jusqu’au bout ni totalement conquise donc. Cela dit, la fin vaut le détour…
Je reste une grande admiratrice de l’auteur bien sûr, et je lirai avec un très grand plaisir son dernier roman A moi seul bien des personnages. J’ai également dans ma PAL Dernière nuit à Twisted River, que j’ai hâte de découvrir. Et comme beaucoup de lecteurs, je suis une inconditionnelle du Monde selon Garp tout comme j’ai aimé tout particulièrement L’œuvre de Dieu, la part du Diable, entre autres.
Il s'agit d'une lecture commune initiée par Denis. J'inscris également ce billet dans le cadre du challenge "Premier roman" d'Anne.
Belle lecture et bel été !
Heide