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Un tour d'horizon de mes lectures, contemporaines ou classiques. De la poésie, juste pour le plaisir des mots ... De la littérature de jeunesse, au fur et à mesure de mes découvertes. Un peu de cinéma et de la BD de temps à autre ... Bienvenue ... à fleur de mots!

La vie, la poésie (4) : Rémy de Gourmont, Le soir

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Le jardin Majorelle au coucher du soleil (site)

  

Le soir

Heure incertaine, heure charmante et triste : les roses
Ont un sourire si grave et nous disent des choses
Si tendres que nos cœurs en sont tout embaumés ;
Le jour est pâle ainsi qu'une femme oubliée,
La nuit a la douceur des amours qui commencent,
L'air est rempli de songes et de métamorphoses ;
Couchée dans l'herbe pure des divines prairies,
Lasse et ses beaux yeux bleus déjà presque endormis,
La vie offre ses lèvres aux baisers du silence.

Heure incertaine, heure charmante et triste : des voiles
Se promènent à travers les naissantes étoiles
Et leurs ailes se gonflent, amoureuses et timides,
Sous le vent qui les porte aux rives d'Atlantide ;
Une lueur d'amour s'allume comme un adieu
À la croix des clochers qui semblent tout en feu
Et à la cime hautaine et frêle des peupliers :
Le jour est pâle ainsi qu'une femme oubliée
Qui peigne à la fenêtre lentement ses cheveux.

Heure incertaine, heure charmante et triste : les heures
Meurent quand ton parfum, fraîche et dernière fleur,
Épanche sur le monde sa candeur et sa grâce :
La lumière se trouble et s'enfuit dans l'espace,
Un frisson lent descend dans la chair de la terre,
Les arbres sont pareils à des anges en prière.
Oh ! Reste, heure dernière ! Restez, fleurs de la vie !
Ouvrez vos beaux yeux bleus déjà presque endormis...

Heure incertaine, heure charmante et triste : les femmes
Laissent dans leurs regards voir un peu de leur âme ;
Le soir a la douceur des amours qui commencent.
Ô profondes amours, blanches filles de l'absence,
Aimez l'heure dont l'oeil est grave et dont la main
Est pleine des parfums qu'on sentira demain ;
Aimez l'heure incertaine où la mort se promène,
Où la vie, fatiguée d'une journée humaine,
Entend chanter enfin, tout au fond du silence,
L'heure des songes légers, l'heure des indolences !


Rémy de Gourmont (1858-1915), Divertissements, Poèmes en vers, Crès, 1912

Ecrivain français, proche des symbolistes.

van gogh crépuscule-copie-1 Vincent van Gogh (1853-1890),

La Nuit étoilée,  Huile sur toile, 1889

 

 

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R
<br /> au sujet de l'heure<br /> incertaine...<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> D’anciennes façades  décrépies sont comme  tachées,<br /> Une végétation touffue croise ses bras verts pour cacher<br /> Une grille que nul , depuis longtemps, n’a fréquentée<br /> Scellée par la rouille, et dont personne n’a la clef<br /> <br /> <br /> La fontaine est muette,  l’eau ne chante plus sous le tilleul,<br /> La vasque est presque remplie  de feuilles  en deuil,<br /> Et de papiers, qui se soulèvent  avec le vent<br /> La place,  désertée par l’été et les gens<br /> <br /> <br /> On ne comprend pas où mènent ces escaliers<br /> Qui s’élancent, puis, s’arrêtent par paliers<br /> Vers une  tour en partie détruite<br /> Et que plus personne  n’habite<br /> <br /> <br /> La nuit  est tombée, accompagnée par la lune<br /> L’humidité  s’étale,  de la proche lagune<br /> Le satellite, se double  d’un halo<br /> Qui se mire dans les  flots<br /> <br /> <br /> Du canal, aux reflets de vagues molles<br /> Venant lécher de noires gondoles<br /> Echouées, là,  de biais, elles ont perdu leur emphase<br /> Embarcations envahies par la vase…<br /> <br /> <br /> De pâles lueurs tremblotent derrière les vitraux  de l’église<br /> Dans ce quartier un peu à l’écart,  de Venise,<br /> De briques  et de marbres, les palais ont les pieds  fourbus<br /> Les murs qui s’écaillent, disent un prestige  déchu.<br /> <br /> <br /> La madone  sculptée, au nez rongé, est toujours dans sa niche<br /> Une fenêtre bouchée effeuille  d’anciennes  affiches<br /> Indiquant des saisons passées les fêtes  du Grand canal<br /> Paillettes, danses  et masques  du carnaval…<br /> <br /> <br /> Tout est silence à part une gerbe  d’étincelles<br /> D’une  radio lointaine,  parvient une  tarentelle,<br /> Et la brise déplace doucement ses voiles,<br /> Dans un ciel de velours piqueté  d’étoiles.<br /> <br /> <br /> Où se déplacent paresseusement quelques nuages<br /> Dont le zodiaque ne prend pas ombrage<br /> Même pas  le verseau et Ganymède<br /> Toujours brillants  dans la nuit tiède.<br /> <br /> <br /> -<br /> <br /> <br /> RC – 7 juillet 2012<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br />
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H
<br /> <br /> Merci pour le partage de ce très beau poème. Je mets ton blog dans mes liens. <br /> <br /> <br /> <br />